ATELIER DE RECHERCHE ALBA > ARTICLES > comment intervenir sur les escaliers de beyrouth en préservant leur différence?
LE PROJET: les escaliers publics de Beyrouth | RÉCIT: Karm el Zeitoun, par Jocelyne Kotait |
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par Pierre Hage Boutros et Rana Haddad
Il y a un certain nombre d’escaliers publics disséminés dans la ville de Beyrouth. Chacun est unique. Leur dimension, leur forme varient de l’un à l’autre. Ils peuvent avoir la largeur d’une rue, ou au contraire permettre à peine le passage d’un homme; quelques-uns sont très fréquentés, d’autres restent souvent déserts, soit qu’ils ne mènent plus nulle part, soit que des voies routières alternatives les ont rendus obsolètes; on en trouve groupés dans un quartier, alors que certains sont isolés.
ce ne sont pas des ruines. la plupart d’entre eux sont opérationnels et utilisés quotidiennement. ces escaliers sont une donnée actuelle.
Ils n’en sont pas moins marginaux par rapport aux flux de circulation automobile de la ville. Cette marginalisation a entraîné un désintérêt de la part des pouvoirs publics dont la conséquence est leur dégradation lente mais continue.
il y a danger à les ranger sous une catégorie.
Chacun d’entre eux raconte une histoire qui lui est propre. ce sont quelques-uns des derniers récits que la ville de beyrouth propose encore. Si le propre d’une ville est de produire des récits, ils font partie de ces derniers lieux qui sont encore la ville. Leur survie est due pour une part au hasard, et pour l’autre à la topographie c’est à dire à une manière d’être de la terre, tous deux sont des facteurs impondérables: que notre regard vienne à se poser sur eux risque de les détruire définitivement.
Il ne s’agit pas de sauvegarder un élément historique, un morceau de patrimoine. Il ne s’agit pas non plus de les faire mieux fonctionner ou de leur assigner a priori une nouvelle finalité. Ils perdraient la seule chose qui fait leur intérêt et qui est leur différence. nous n’aurions gagné qu’à les soustraire à ceux qui les pratiquent quotidiennement, et en à faire des caricatures.
Pris dans leur ensemble, en tant que forme disséminée, ils ont en commun la capacité à tisser des liens à la fois dans le temps, en mettant en rapport un temps passé et notre expérience actuelle, et dans l’espace, en réunissant dans une même figure des lieux séparés. 
Les escaliers de beyrouth en tant qu’objets peuvent-il, en raison même de leur dissémination, nous fournir des instruments qui permettent de se réapproprier la ville et la poser à nouveau comme espace partagé, condition nécessaire de la liberté citoyenne.
méthodologie
L’habitant de la ville s’approprie la cité. il déchiffre mais aussi doit écrire son propre cadre d’interprétation. trouver le langage qui puisse traduire, objectiver votre interprétation.
Envisager la totalité du phénomène. prendre en compte les aléas de toutes sortes, les accidents de morphologie, les dérives fonctionnelles, les appropriations des habitants, les ajouts, les ratures, la manière dont les habitants se réfèrent à eux, les désignent, etc.
Trouver quels sont les rituels urbains de la cité contemporaine qui peuvent être des moyens de réappropriation de la ville. Quels sont les rituels actuels et possibles que les escaliers permettent ou permettraient de développer?
nature de l’intervention
A cause de l’abondance du bâti existant dans la ville, la richesse des connexions et des expériences spatiales possibles, l’intervention sera pensée dans ces termes: trouver, dégager, inventer des relations entre l’espace matériel de l’escalier et ses significations possibles.
Etre soi-même l’instrument à travers lequel la totalité de la ville serait re-définie. Les escaliers, à leur tour, seront les instruments à travers lesquels chacun pourra re-définir sa ville.
Beyrouth, mars 1998, tous droits réservés
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